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27 août 2012

JDD : "Je reprends une forme de liberté "

Interview du JDD du 25 aout 2012



Dans David et Madame Hansen, la star est particulièrement émouvante face à Alexandre Astier qui réalise son premier film.
Elle possède une délicatesse unique qui en fait une personne singulière. Une intelligence à fleur de peau, une gravité que l’on ose bousculer, des sourires qui s’échappent. Elle aime aussi s’amuser. Est-ce ce changement d’existence, le fait de retravailler, les studios, les caméras… Depuis quatre ans, Isabelle Adjani multiplie les projets. "Je n’ai plus que moi à m’occuper", dit-elle avec douceur. La voilà donc de retour sur les écrans dans David et Madame Hansen, d’Alexandre Astier, fragile, touchante. Ce qu’on aime chez elle? Sa façon d’oser des personnages, des auteurs, des idées sans préjugés. Une icône du cinéma français chez le créateur de Kaamelott? L’association fonctionne plutôt bien. Après? Elle tournera deux films. Celui d’Abel Ferrara, avec Gérard Depardieu, librement inspiré par l’affaire DSK ; puis celui de Jean-Paul Lilienfeld, le réalisateur de La Journée de la jupe. Ces jours-ci, elle termine quelques scènes d’un Bollywood à Prague, commencé elle ne sait plus trop quand. Et rêve – pourquoi pas? – de théâtre en 2013. Tout l’amuse, l’intéresse, attise sa curiosité. Rencontre.
 
 

Qu’est-ce qui vous a séduite chez Alexandre Astier?
Qu’il soit aussi un auteur. Pas juste le réalisateur ; sa vision du monde, ses partis pris sont très personnels. Il possède une forme de mélancolie qu’il sait sublimer avec humour quand il raconte une histoire, comme il l’a fait pour le roi Arthur dans Kaamelott. Artistiquement, c’est à la fois un musicien, un acteur, un homme de terrain, un compositeur, un monteur.
Lui aussi est dithyrambique quand il parle de vous.
Vous savez, on est exceptionnel si on travaille avec des gens exceptionnels. On est très rarement exceptionnel tout seul.
Vous avez croisé beaucoup de gens exceptionnels dans votre vie?
Pas assez.
«Dans chaque film, il y a un inconscient qui est à l'oeuvre» Cela vous procure-t-il des regrets?
Oh, oui ! C’est pour cela que je continue ma carrière.
Qu’est-ce qui vous a plu dans le scénario de David et Madame Hansen?
Le thème de la solidarité, de la tendresse envers l’autre. On a beaucoup parlé du scénario avec Alexandre Astier. J’aime bien proposer des idées, comme celle d’avoir les cheveux gris argenté dans le film. C’est la couleur du traumatisme pour Mme Hansen, qui a vécu un drame. Tant qu’elle porte cette couleur, elle ne retrouve pas la mémoire. J’apprécie la symbolique dans l’écriture. Dans chaque film, il y a un inconscient qui est à l’œuvre.
En 2009, après La Journée de la jupe, vous disiez vouloir consacrer plus de temps à votre carrière. C’est fait?
En tout cas, j’ai plusieurs projets. Remonter sur scène en 2013 par exemple. Tourner, avec Jean-Paul Lilienfeld, Les Visages écrasés, un roman de Marin Ledun. Je n’ose plus vraiment le dire car je le déclare chaque année, mais cette fois je crois vraiment que je ne vais plus m’arrêter! (Rire.)
Vous allez bientôt tourner avec Gérard Depardieu dans le film d’Abel Ferrara, qui s’inspire des relations entre DSK et Anne Sinclair aux États-Unis quand ils se retrouvent dans leur maison assiégée par la presse mondiale.
Ce sera le huis clos d’un couple pris dans la tourmente. Même si on ne porte pas les noms des personnalités en question, qui est dupe? Ça devrait être passionnant car il y a un metteur en scène qui n’est pas français aux commandes et il va aller là où ça fait mal. Avec lui, il n’y a aucun risque de politiquement correct. Et puis, il y aura Gérard Depardieu. Gérard, c’est un monument national. Il est invraisemblable, je pense qu’il aura les obsèques de Victor Hugo. (Rire.)
Vous êtes devenue plus disponible qu’à d’autres époques de votre vie?
Même si mon plus jeune fils – il a 17 ans – n’est pas complètement élevé, et que je tiens à passer les vacances avec lui, je reprends une forme de liberté. Et puis, ceux dont j’avais charge d’âme, mon frère, mes parents, ne sont plus. Donc voilà… je suis libre de m’occuper un peu de ma vie.
«La journée de la jupe était un film prémonitoire» Une femme libre qui mène librement sa carrière…
Mais cette carrière a toujours été une profession de foi. Si on n’est pas dans le don de soi à travers cet étrange métier, on est dans pas grand-chose. On bascule dans le vide de l’imposture qui occupe une place prioritaire aujourd’hui.
Comment cela?
Je parle du vide du succès et de la renommée. De ce monde bancal dans lequel on a basculé ces quinze dernières années où le talent et le don passent après la nécessité absolue d’accéder à la notoriété. Le film de Xavier Giannoli, Superstar, raconte remarquablement cette dérive.
Dans votre jeunesse, de quoi aviez-vous envie?
J’avais toujours imaginé, jusqu’à ce que le destin me donne tort, que j’allais m’occuper des autres, rester dans l’ombre pour les aider. Et puis, c’est plutôt l’inverse qui s’est produit!
On connaît vos engagements passés, qu’ils soient humanitaires, sociaux ou politiques à travers l’Algérie, le sida, la liberté des femmes, l’intégrisme… Vous avez affiché ce que vous appelez "une ligne de conduite".
J’essaie… Quand je vois que la femme, déclarée "avenir de l’homme" par Aragon, est sur le point d’être considérée comme "complément" de l’homme en Tunisie, je frémis… On vit une période tourmentée, de plus en plus dure pour tous. Je pensais en 2009 que La Journée de la jupe était un film témoin alors qu’il était prémonitoire. Aujourd’hui, la situation est pire. Ça ne va pas être simple pour les générations qui arrivent…
Est-ce pour autant sans espoir?
J’espère que non. D’ailleurs, j’attends fin 2012 (elle sourit). Quitte à faire loufoque, j’ai envie de croire, un instant, aux prédictions mayas. Rien de divin, mais plutôt une sorte d’intervention de l’univers. Vous voyez, j’ai un petit espoir. (Rire.)

Danielle Attali - Le Journal du Dimanche

 
 
 

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