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30 août 2012

"J'ai besoin qu'on oublie la star" -interview pour la Nouvelle République

Sa rareté en fait un peu la Garbo des temps modernes. Pour la sortie de “ David et Mme Hansen ”, Isabelle Adjani s’est confiée à La NR-Centre Presse.



Si des jeunes gens attendent devant le discret hôtel de Sers à Paris, c'est pour Pete Doherty qui déambule dans les couloirs, encadré de potes bruyants et tatoués, les bras chargés de packs de bière. Seule dans la cour intérieure, Isabelle Adjani attend son interlocuteur discrètement, sans lunettes noires (pour une fois !), prête à toutes les confidences.
Qu’est-ce qui vous touche le plus chez Mme Hansen : ses fragilités ou le côté presque burlesque de ce qu’elle dit parfois ?
Isabelle Adjani : Les deux. Elle est prisonnière d’une absence à elle-même provoquée par une amnésie post-traumatique. Elle ne sait plus vraiment qui elle est et sa parole est franchement désinhibée, libre. Je trouve cette forme de résilience toujours bouleversante chez les gens en souffrance. Elle est comme un petit animal aux aguets qui cherche quelque chose sans savoir quoi. Elle est pourtant dans la vie : on ne quitte jamais la vie avant que la vie vous abandonne.

Il y a souvent de la virtuosité dans vos interprétations, choisissez-vous vos rôles pour qu’ils vous amène à ce niveau de virtuosité ?
Isabelle Adjani : C’est le plus joli compliment que vous puissiez me faire. Vous savez, j’ai toujours besoin de croire, pendant un tournage, qu’il n’y a pas mieux que moi pour le rôle. C’est une fable évidemment, mais le croire sincèrement peut me permettre "LE très bel accomplissement "et, pourquoi pas, de la virtuosité.
Manquez-vous de confiance en vous ?
« Oui, mais je suis bien contrainte et forcée de me faire confiance quand on compte sur moi pour réussir quelque chose. Mon éducation et les épreuves de la vie ont inscrit une tendance a l'autodévaluation contre laquelle je lutte encore, même après douze ans de psychanalyse. » (Rires)
Est-ce que la star n'encombre pas la comédienne ?
« J'ai une vie beaucoup trop simple pour ça. Je vis un peu au jour le jour et je suis ouverte à la vie, même si elle peut parfois jouer de mauvais tours. Ce qui me met mal à l'aise, c'est lorsque mes interlocuteurs s'adressent à mon image plutôt qu'à… moi. Même si c'est beaucoup demander, j'ai besoin qu'on oublie la star pour être moi-même, sinon je file à l'anglaise. »
Vous allez tourner pour Abel Ferrara avec Depardieu, dans une adaptation de l'affaire DSK, comment avez-vous réagi lorsqu'elle a éclaté ?
« Ne trouvez-vous pas étrange qu'un problème sexuel de cet ordre ne se traite pas ? Ce que ferait un Américain, réaction pragmatique ! »
« Je ne suis pas là pour juger la vie sexuelle des gens, mais si on planifie d'être candidat à l'élection présidentielle, il vaut mieux régler le problème, non ? C'est quand même fascinant cette forme d'autodestruction. »
" C'est ma façon d'emmerder les bien-pensants "
Vous avez déclaré que ce que vous aviez le mieux réussi c'était vos échecs amoureux. Est-ce que ça vous rend réfractaire à l'amour ?
« Ah ! non ! pas du tout ! Ce serait terrible. Simplement, j'aimerais que ce soit moins malheureux. J'avais d'ailleurs chanté une chanson de Gainsbourg qui s'appelait L'amour c'est malheureux. »
Pourquoi ne pas refaire un disque ?
Isabelle Adjani : Parce que Serge Gainsbourg savait faire chanter les actrices : il n’aimait pas les chanteuses à voix mais davantage le souffle et les murmures des actrices.
En parlant de chanson, où en est le projet avec Pascal Obispo ?
« J'ai enregistré de très jolies chansons, mais il n'y avait pas de contrat avec une maison de disques. Il en est le producteur, elles lui appartiennent. Je pense qu'il les garde dans son coffre-fort, amoureusement j'espère. »
Des clichés de vous sont parus en compagnie de Zahia Dehar, vous l'admirez ?
« Ce n'est pas de l'admiration, c'est ma façon d'emmerder les bien-pensants. Par ailleurs, je trouve que ce qu'elle est en train de réaliser est intéressant et qu'elle fait plus courant d'art que courant d'air.
J'aime que cette fille qu'on traite comme une pute, qu'on regarde comme une salope suive son petit chemin en faisant raquer un mec, comme une galante du XIXe siècle, son protecteur. Ça m'amuse beaucoup. C'est pour emmerder le bourgeois comme dirait Jacques Brel et je n'ai pas touché un centime pour en dire du bien. »
Vous venez de tourner un film Boolywood ?
C’est une comédie romantique coproduite par l’actrice principale Preity Zinta. Elle est à la fois délurée et féministe mais respecte les codes du cinéma indien : pas de baiser, pas de sexualité. Néanmoins, elle y parle d’amour, de désir, de sexualité. Je joue sa mère et, comme à la fin il y a tout-de-même un mariage, je danse avec toute la troupe, costumée traditionnellement. Ca s’appelle «Ishkq in Paris». Je l’ai tourné en hindi, mais phonétiquement. L’hindi ne fait pas partie des langues que je possède.
la critique
L'amnésique et le pince-sans-rire
Mme Hansen est internée dans un luxueux établissement suisse. Victime d'un traumatisme, elle souffre d'amnésie. A l'occasion d'une sortie avec son ergothérapeute (Alexandre Astier), elle revient dans la maison où s'est déroulé le drame déclencheur. Premier long-métrage du créateur, acteur et réalisateur de l'hilarante série « Kaamelott » diffusée sur M6, « David et Mme Hansen » souffre d'un handicap insurmontable : Alexandre Astier a bâti toute sa carrière sur le « pince-sans-rire » et on a du mal à le prendre au sérieux. Et puis on aimerait tellement voir, enfin ! l'immense Adjani jouer la sobriété.
Sortie mercredi 29 août.


en savoir plus
Depardieu, " avec moi, il retrouve le plaisir de jouer "
« Je suis vraiment ravie de tourner pour la 5e fois avec Gérard [« Barocco », « Camille Claudel », « Bon voyage », « Mammuth », ndlr]. Je l'appelle " Le monument national " ! On ne se voit pas beaucoup dans l'année, mais sitôt que nous tournons ensemble, nous sommes sur la même longueur d'onde. C'est un type d'une immense sensibilité et d'une réelle culture. Gérard fait partie des acteurs qui tournent trop pour ne pas s'ennuyer. Quand nous sommes dans la même scène je vois que son regard m'envoie de la reconnaissance parce que je le surprends, qu'il retrouve le plaisir de jouer et qu'il oublie un moment sa bouffe, son pinard et son téléphone 

1 commentaire:

Anonyme a dit…

c'est marrant Isabelle veut qu'on oublie la star mais on sent aussi qu'elle fait tout pour l'entretenir....je sens cette ambivalence chez elle mais attention, je dis cela avec beaucoup d'affection....


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