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4 mars 2010

Vive la chute des icônes romantiques ! - L'interview de Gala.

Vive la chute des icônes romantiques. Déjà couronnée quatre fois aux César, la comédienne est en lice pour une cinquième statuette , le 27 février. Un record. A cette occasion, elle a choisi Gala pour une interview vérité. Amours, engagements,audaces, mademoiselle Adjani ne connait pas la langue de bois.



La légende veut que les grandes stars du cinéma soient déconnectées du quotidien. La légende veut qu’Isabelle Adjani soit une artiste mystérieuse, inaccessible et hors du temps. Ce matin-là, la femme qui se tenait face à moi, avec un gros bonnet de laine sur la tête, allait me prouver qu’il ne faut pas croire les légendes urbaines. Matinale (on l’est forcément quand on est mère de famille), connectée à la société... la comédienne parle d’une voix douce mais ces mots sont cash. C’est peut-être à cela qu’on reconnaît les vraies légendes...celles du cinéma : elles n’ont plus peur de rien et surtout pas de dire les choses !

 Gala : Vous êtes la seule à avoir été couronnée quatre fois en tant que meilleure actrice aux César. Et le 27 février, vous avez même la possibilité de décrocher un cinquième trophée. Comme les athlètes, les comédiennes peuvent-elles être aussi associées à des records ?
Isabelle Adjani : Recevoir un César a une vraie signification, celle de la reconnaissance, mais en même temps ces quatre récompenses ne définissent ni ce que je suis ni ce que je fais. Vous parliez de record... mais il y a un revers à la médaille. Nous sommes en France et chez nous, le premier de la classe n’a pas toujours bonne pressse. Les américains adorent se congratuler entre eux. Nous, non ! Il m’est arrivé d’entendre des actrices dire : “ J’espère que je ne vais pas avoir le César, parce qu’on ne va plus rien me proposer.” Le comble, non ? Quand vous êtes récompensé, vous vous distinguez. Sans le vouloir, vous vous désolidarisez de la grande famille du cinéma. Vous êtes perçu comme faisant cavalier seul.
 Gala : En 1995 , vous n’êtes pas venue chercher votre César pour votre interprétation de La reine Margot. Pourquoi ?
I.A. J’étais enceinte de sept mois et demi, j’avais peur qu’on se focalise sur mon ventre rond, d’autant que j’allais devenir maman seule. Je n’avais pas le coeur d’affronter ça. Aujourd’hui cela aurait fait de jolies photos pour gabriel-Kane. Tant pis. (Sourire.)
Gala : Cette cérémonie est une caisse de résonance. Quelques années plus tôt, en 1989, vous aviez été récompensée pour Camille Claudel. Vous aviez lu un extrait des Versets sataniques, de salman Rushdie...Auteur qui était frappé par une fatwa.
 I.A. : Cette soirée est une tribune exceptionnelle, ce serait dommage de l’ignorer. L’ignorer, ce serait finalement la sacrifier. Nous sommes en direct avec le public, il n’y a pas de contrefaçon possible. C'est l’un des rares moments médiatiques où il peut se produire quelque chose qui ne soit pas convenu. Ce que les gens ont parfois du mal à entendre des politiques, ils le ressentent et le comprennent grâce aux artistes. A condition bien sûr, d’être crédibles et légitimes.
 Gala : Si tout le monde partageait votre point de vue, les soirées des César seraient plus animées.
 I.A. : Attention , je ne critique absolument pas ceux qui montent sur scène et disent : “Merci, je ne sais pas quoi dire, je n’ai rien préparé.” On a aussi le droit d’être pris par l’émotion, dans la modestie et la timidité. Il faut bien se rendre compte que ce moment qui vous consacre est un choc. Pour moi aussi, malgré les apparences, mais tout le parcours d’une actrice est un traumatisme. Déjà à la base. J’ai passé toute mon enfance et mon adolescence à entendre “Ne te fais pas remarquer !”J’ai bien raté mon coup ! Ce traumatisme est devenu positif et , au cours des années , m’a donné l’élan, l’énergie de la prise de parole. Je me sens une responsabilité, le devoir de m’exprimer, je n’y peux rien !
Gala : Et que répondez vous à ceux qui vous prient de vous mêler de ce qui vous regarde ?
I.A: A ceux-là, je leur fais un bras d’honneur ! C’est démodé de dire cela, aujourd’hui on est tous engagés, sinon on n’existe pas et on ne fait rien exister. Je fais partie des gens sur lesquels on compte. Je ne vais pas faire comme si ce n’était pas le cas. J’aurais alors l’impression de trahir les valeurs que je veux partager avec la société dans laquelle je vis.
Gala : Cette année vous êtes nommée pur votre rôle de prof dans la journée de la jupe. Un film bouleversant sur la discrimination des femmes en banlieue. Dans ce film, les ados sur-nomment cette prof “Boulette”, en référence à une chanson de Diam’s. Que pensez vous du choix de cette artiste de se produire désormais voilée sur scène ?
I.A. : Je suis atterrée et profondément désolée; je ne la connais pas. Je trouve qu’elle a un talent fou et je ne comprends pas ce qui lui arrive. “Se voiler la face” provient peut-être d’une grande détresse. Le problème, c’est que cette détresse peut être contagieuse.
Gala : Cette journée de la jupe est un nouveau départ pour vous. Vous l’avez dit. Ce rôle casse aussi littéralement votre image d’héroïne romantique, tourmentée...
I.A. : Mais pour moi, être actrice c’est aussi l’art de la métamorphose. Vive la chute des icônes , vive la chutes des icônes romantiques. (Rires.)
Gala : Avez vous vu la caricature qu’avait faite de vous Florence Foresti ? Elle était dans cet esprit . Votre personnage était hors du temps et répétait sans cesse : “Je ne suis pas folle , vous savez ? “
I.A. : J’adore ! Irrésistible ! Je lui avais d’ailleurs laissé un message où je rentrais dans son jeu. C’était tendre de sa part. Elle voulait dire : “Elle ne fait peut-être pas tout comme vous vous voulez, mais pourquoi on le lui reprocherait ? “ J”aime sa dérision, car je me tourne en dérision moi-même chaque jour. Il faut chasser le spleen, j’ai longtemps cherché à être comprise, aimée , protégée, j’ai fini par comprendre que cela était juste impossible et que je n’avais qu’à m’en charger moi- même.
 Gala : Comment l’avez vous compris ?
I.A. : M’affranchir de toute cette souffrance vécue pendant l’enfance, c’est passé pour moi par une analyse. Un beau jour vous lâchez prise et vous faites le deuil d’un fatras de choses qui vous pourrissent la vie.
Gala : Parlons d’enfance. Est-ce facile d’être les enfants d’Isabelle Adjani ?
I.A. : Ce n’est jamais facile d’être le fils ou la fille de. Pour mon grand fils, qui est musicien, je crois que c’est un encombrement plus qu’autre chose.(Rires.)
Gala : Vous avez déclaré avoir un âge intime qui ne coïncide pas avec votre état civil. Quel âge intime avez-vous, Isabelle ? Celui d’une adolescente rebelle ?
I.A.: Si mon fils vous entendait...(Rires.) Il ne faut pas exagérer ! Si vous voulez vraiment savoir, il y a des moments où je n’ai pas encore passé le cap de la crise de la trentaine ! En tout cas, je ne me suis jamais sentie aussi bien et je commence à m’amuser.
Gala : Dans les prochains mois , vous allez tourner et coproduire un film dans laquel vous jouerez la rédactrice en chef d’un magazine people. Comprenez-vous qu’il y ait des gens pour lire ce type de presse ?
I.A. : Je ne les achète pas, mais quand je tombe dessus, je les feuillette. On a tous une curiosité de midinette ! Je comprends que ces journaux rencontrent un vrai succès, surtout auprès des jeunes qui se cherchent à travers des modèles de réussite. Pour autant il ne faut pas confondre l’intrusif et la transparence. Ces magazines sont voyeuristes sous prétexte de vérité toute crue.
 Gala : Vous avez souvent été transparente justement. Notamment quand vous avez parlé de l’infidélité de votre ancien compagnon dans l’Express. Pourquoi ce choix ?
I.A. : Plus que d’infidélité, il s’agissait du thème du harcèlement moral. Je l’avais fait pour ne pas tomber malade, et puis si ma démarche pouvait rendre service à quelques dizaines de femmes...... Je suis très proche de toutes les causes féminines. Si des hommes ont pu me le reprocher , too bad ! La révolte me rend un peu radicale, je le concède.
Gala : Au fil des années, vos mésaventures amoureuses ont aussi forgé cette image d’héroïne romantique dont nous parlions tout à l’heure...
 I.A : Même avec un coeur romantique, sincèrement, je me serais bien passée de toutes les histoires d’amour qui font du mal. Elles ne sernt jamais des moteurs de création à mes yeux. Je ne fais pas partie des artistes qui idéalisent le désespoir ou la solitude. Comme dit mon plus jeune fils : “Le prochain, il faudra lui faire passer un vrai casting !”(Rires.)
 Gala : Vous avez fait l’actualisté ces derniers jours pour des raisons moins artistiques. Vous avez prêté une grosse somme d’argent à l’homme avec lequel vous viviez et que vous avez quitté depuis. Un don à son association qui projetait de créer un site internet médical dont la vocation humanitaire a été mise en doute. La justice vous a donné raison en ordonnant une saisie et vous reverserez cette somme au sidaction.
I.A. : Je ne ferai pas de commentaire de cette histoire. J’ai commis une erreur tout simplement. Mais ma mésaventure ne doit pas décourager les gens de faire des dons à des associations qui oeuvrent vraiment au bien des autres. A part ça, la vie, ce n’est pas avoir de l’argent, mais simplement essayer de ne pas en manquer. Nous sommes dans une société qui souffre d’un tel manque de solidarité que chaque geste d’entraide compte plus que jamais.

Propos recueillis par Mathias Gurtler

Photos à voir sur le lien Photos du gala 872 du 24 février

2 commentaires:

Anonyme a dit…

un bel article très adjanien, les trois H , humour, humanisme, humeur, Ia met les points sur les Is avec maestria! ce 5ème César, on le souhaitait tous, et en même temps, maintenant, c'est une attente angoissée et après? il y aura toujours des jalousies,certainement, et des mises à l'épreuve, et Ia met la barre si haut! et tout ce que l'on souhaite, c'est l'accomplissement de tous ses beaux projets, la voir jouer encore et encore!mais surtout juste de la sérénité et du bonheur dans sa vie! a

fredjani a dit…

Un forum est consacré aux derniers numéros, interviews d'Isabelle, alors n'hésitez pas a y laisser vos ressentis...

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