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19 mars 2009

Vosges matin, interview JDLJ

Interview : " isabelle Adjani fait la leçon " (part 2)



Isabelle Adjani incarne Sonia Bergerac dans «La journée de la jupe», réalisé par Jean-Paul Lilienfelfd, qui est diffusé sur Arte le 20 mars et sort en salles le mercredi 25. Une prof «qui pète les plombs» : alors qu'un collégien a apporté une arme en classe, elle prend ses élèves en otage et leur fait la leçon, revolver en main.



Qu'est-ce qui vous intéressait dans ce personnage et cette histoire ?

"C'était la force évidente du scénario, que je trouvais inhabituel, et surtout le traitement politiquement incorrect du sujet, sans angélisme idéaliste. Ce n'est pas un film pour donner des réponses ni une morale. On se demande pourquoi aujourd'hui les ados, d'origine modeste ou aisée, sont en conflit avec l'idée d'être enseignés. Les enseignants arrivent de moins en moins à faire strictement leur métier, ils en font plein d'autres, assistante sociale, psy, planning familial, médiateur, conseiller familial... Et le temps pour la transmission de l'enseignement est mis à mal."

Comme dans le film de Laurent Cantet, c'est aussi une prof qui est «Entre les murs»...

"On ne peut pas comparer, dans l'un, il s'agit de l'observation fictionnée mais proche du documentaire. Là, c'est la fiction d'une séquestration, d'ailleurs ce sont des enfants qui sont déjà séquestrés socialement, il y a comme une double séquestration. C'est un peu la fin du parcours de la prof d'«Entre les murs» qui n'y serait pas arrivée, et qui la fait basculer dans l'extrémisme. Il n'y a aucune préméditation, cette Sonia Bergerac n'aurait jamais imaginé qu'elle ferait cela, c'est la difficulté qu'elle a à faire son métier qui la fait basculer d'un coup. Elle est atterrée d'être dans cette situation, d'être dans le rôle de l'agresseur, du criminel."


"Valoriser les origines"


Vous trouvez qu'il y a une régression dans les rapports entre les filles et les garçons ?
"Bien sûr. Ces garçons vivent une telle exclusion, sont dans une telle déshérence identitaire, qu'ils brandissent le Coran comme des étendards, pour mener une guerre sainte imaginaire et semer la terreur. Mais leur argumentaire est basé sur une ignorance crasse, c'est le poids d'une religion qui n'est ni pratiquée dans la connaissance, ni assimilée. Il me semble qu'il serait intéressant de valoriser leurs origines, et de ne pas les laisser dans un imaginaire victimaire dans lequel ils se tiennent."

On vient de le voir, en France et en Allemagne, l'école est devenu un lieu de violence...

"Oui, ça m'a beaucoup choqué. C'est étrange d'imaginer une bande qui, pour régler ses comptes, va castagner tous ceux qui se trouvent à dispos. Quant au gosse qui est passé à l'acte en Allemagne, il faudrait arrêter, sous prétexte qu'on ne veut pas être réac, de dire que cela n'a rien à voir avec ce qui passe à la télé, l'ultra-violence, le trash, l'internet... Il faudrait que des experts répertorient ce qui psychiquement, entre le virtuel et le réel, est un vrai danger, et amène un adolescent au passage à l'acte. Sans accompagnement adulte, un enfant ne peut pas grandir dans des notions civiques, humanistes, solidaires, fraternelles, respectueuses."


"Une mère assez sévère"


L'école est-elle encore le moyen de sortir d'un milieu social défavorisé ?
"Non. Aujourd'hui, un enfant qui décide de travailler à l'école, je trouve ça courageux, valeureux. Hors-école, si vous avez un nom à consonance maghrébine, ça pose toujours un problème, il y a de quoi être découragé pour ces enfants. En tant que citoyenne, que mère, j'ai l'impression que ça ne va pas du tout et que ça risque de péter."

Quelle éducation avez-vous donné à vos deux fils ?

"Je suis une mère assez sévère, même si je suis une grande fan de Françoise Dolto. J'ai une fibre assez pédagogique, j'ai toujours lu des ouvrages très tôt sur le sujet, cela ne veut pas dire que ça fait de moi une bonne mère, ce serait trop simple. Si on réussit à ne pas leur faire prendre un chemin raté pour leur épanouissement, c'est déjà pas mal, avoir des enfants qui ont le goût du bonheur, qui ne sont pas attirés par l'autodestruction et ne se mettent pas en situation d'échec, c'est déjà ça."

Qu'est-ce qui vous révolte ?

"Ce qui me rend malade dans la vie, c'est ce qu'on fait aux enfants et des enfants, depuis toujours. J'ai un instinct maternel qui ne s'arrête pas à mes enfants, je suis une des marraines de l'association Innocence en danger, qui combat la pédophilie cybernétique, prend en charge les enfants, et ne s'arrête pas au juridique. Je trouve vraiment qu'on vit dans une société très égoïste, très narcissique, et où on respecte si peu ce qu'est un enfant."


Propos recueillis par Patrick TARDIT

1 commentaire:

Anonyme a dit…

vrai, que dans cette société en désarroi,la place de l'enfant est de plus en plus, celle de l'oiseau sur la branche,au gré des mauvais vents,sans ciment, sans serments!a

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